Entrée payante à Notre-Dame, une solution parmi d’autres pour entretenir le patrimoine

Alors que la réouverture de Notre-Dame est imminente, la déclaration de la ministre de la culture suggérant de faire payer l’entrée (5€, soit 75 millions d’€ de recettes par an) a créé polémique entre ceux qui soutiennent un telle proposition, qui aurait aussi pour conséquence de permettre d’entretenir le patrimoine national, et ceux qui sont fondamentalement contre. En ces temps de disette budgétaire où le financement de  l’entretien de nos monuments devient secondaire, où les communes peinent à entretenir leurs églises (allant jusqu’à décider de démolir des lieux de culte non classés souvent du XIXe siècle), lorsque l’on voit l’état de certains édifices religieux y compris à Paris où une action de restauration d’ampleur devenue indispensable a été néanmoins entreprise, l’idée de la ministre peut séduire.

Dans une tribune publiée dans Le Figaro du 29 octobre2024, Didier Rykner directeur de la rédaction de la Tribune de l’Art, connu pour défendre le patrimoine, marque une certaine circonspection à l’égard de cette idée reconnaissant qu’il faut « trouver des solutions garantissant des ressources suffisantes pour les  travaux sur les monuments historiques« . Il ajoute « les besoins sont immenses et les ministres successifs ne se sont jamais réellement attaqués à cette question« . Il rappelle au passage que la loi de1905 interdit de faire payer l’entrée dans les lieux de culte et que la conférence des évêques de France y est opposée. Dans ces conditions il semble  difficile d’avancer sur cette question sauf à modifier la loi et se mettre à l’aune des pratiques de certains de nos pays voisins (Italie, Espagne, Grande Bretagne…) qui n’ont pas nationalisé leur patrimoine religieux. Sinon il faut chercher d’autres solutions car une église est avant tout un lieu d’accueil et de recueillement où se trouvent des œuvres d’art. L’équation n’est donc pas simple. Faire payer seulement l’entrée à  Notre-Dame n’est pas logique car alors les entrées des autres cathédrales devraient, elles aussi, être payantes.  Et puis comment assurer les contrôles entre les visiteurs devant s’acquitter du droit de visite et les fidèles pour lesquels ce serait gratuit ?

Parmi les autres leviers de financement, l’éditorialiste cité plus haut pointe à juste titre la part très faible, 5%, du budget du ministère de la culture réservée aux monuments historiques. Peut mieux faire effectivement. Il propose de majorer la taxe de séjour dont s’acquittent les touristes, taxe qui est en dessous des standards de nos pays voisins. L’autre possibilité serait de faire en sorte, à l’instar de la taxe de 1,8%  prélevée sur les sommes versées à la Française des jeux et reversée  au sport, qu’une taxe supplémentaire identique soit prise sur les gains distribués aux gagnants soit réservée à l’entretien du patrimoine (comme l’ont fait les Anglais), nonobstant le loto du patrimoine qui a déjà permis de sauver nombre de biens.

Il est étonnant, vu la créativité au parlement de nos élus, une nouvelle fois démontrée lors du présent débat  budgétaire, qu’aucune suggestion n’ait été faite quant aux moyens de protéger et de financer notre important patrimoine trop souvent en danger et pourtant source de devises car il attire les étrangers?

Il est de plus en plus évident, les années passant et le patrimoine se dégradant, qu’il faudra trouver des moyens pour sauver notre patrimoine que le monde entier nous envie. Nous ne sommes pas la première destination touristique mondiale par hasard. Encore faut-il faire en sorte que nos monuments gardent leur attractivité.  L’exemple de la restauration Notre-Dame en apporte la preuve. Mais sans argent, sans mécènes, sans inventivité c’est tout un écosystème, incluant les métiers d’art et la transmission du savoir-faire de notre pays, qui disparaitrait. Aussi la proposition de la ministre a le mérite de nous faire réfléchir et de poser le problème de notre capacité à trouver les moyens d’entretenir notre patrimoine dans les années à venir.

1 commentaire

  1. C’est oublier que Notre-Dame n’est pas un bâtiment profane et que faire payer une entrée dans une église est impensable car c’est un lieu qui appartient à tous. D’autre part ce serait revenir sur la loi de 1905.

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