Après les polémiques sur la saccage du mobilier parisien ancien et l’épisode du banc de Davioud restitué à la mairie après avoir été racheté dans une vente aux enchères, la mairie par la voix de Karen Taïeb, l’adjointe en charge du patrimoine, vient d’annoncer qu’une soixantaine de fontaines Wallace allaient être restaurées et repeintes en vert d’origine et non en couleur vive. Ces essais avaient été en effet très critiqués, y compris par nos soins. La plupart fonctionnent mais les usagers ne les voient plus comme un moyen de se rafraîchir. Voilà donc une bonne nouvelle après celle de la remise en état de plusieurs fontaines historiques et la restauration de plusieurs édifices religieux qui en ont bien besoin après de longues années de quasi abandon. La mairie affiche ainsi son engagement de protéger ces témoins du passé, marqueurs de Paris et répond à tous ceux qui se morfondaient de voir un si riche patrimoine se déliter.
A propos des fontaines Wallace, Le Figaro daté des 26 et 27 février 2022 donne des informations instructives sur leur histoire. Elles sont sorties pour la première fois des fonderies du Val d’Osne à Sommevoire près de Wassy en Haute Marne en 1872. Rachetés en 1971 par les fonderies GHM (Générale d’hydraulique et de mécanique), ces ateliers, qui possèdent le label « entreprise du patrimoine vivant », continuent depuis 1836 à fabriquer du mobilier urbain dont les célèbres fontaines parisiennes. On compte dans la capitale 106 fontaines, soit bien plus qu’à la fin du XIXe siècle car la ville a continué à équiper les quartiers des ces fontaines jusque dans les années 60. il faut en remplacer de temps à autre suite à des dégradations. Les fonderies GHM qui ont conservé les moules sont donc alors mises à contribution, ce qui permet aux intervenants de conserver tout le savoir-faire nécessaire. Elles sont aussi sollicitées pour refaire d’autres pièces du mobilier urbain parisien tels les candélabres ou les entourages Guimard des bouches de métro.
Rappelons que cette région de la Haute-Marne est le berceau de nombreuses fonderies d’art depuis le XIIIe siècle et il en existe encore de nombreuses en activité (Dommartin le Franc, Brousseval et Montreuil, La Fauchère, Ferry Capitain, Ateliers de Salin…). La plupart des statues, fontaines en fonte, réverbères, potelets, bancs de square et entourages d’arbres en fonte que l’on trouve dans les villes et villages, y compris à l’étranger, viennent du bord de la vallée de la Blaise où étaient concentrés hauts-fourneaux, forges, fonderies, bocards, patouilles et ateliers de transformation. Un circuit des fonderies proposé à la visite a même été mis sur pied dans le département.
Les fontaines Wallace sont nées du souhait du philanthrope Richard Wallace, héritier du château de Bagatelle, d’offrir un accès gratuit à des points d’eau potable aux Parisiens après le traumatisme de la Commune (canalisations détruites, raccordements en nombre insuffisant…). La seconde raison était de faire reculer l’alcoolisme dont les ravages étaient alors importants.
C’est le sculpteur Charles-Auguste Lebourg qui est retenu pour concevoir deux modèles de fontaine. Car il existe des fontaines murales qui ont presque toutes disparues. L’une d’elles se trouve rue Geoffroy Saint Hilaire (5e) adossée au mur du Jardin des Plantes (elle illustre cet article). Ces « brasseries aux quatre femmes » ainsi dénommées sont constituées pour leur fabrication de 77 éléments. L’une d’elles va rejoindre le musée Carnavalet et deux autres sont classées monument historique. Ajoutons que ces fontaines ne fonctionnent plus 24 heures sur 24 toute l’année, mais seulement de mi-mars jusqu’à la fin de l’automne. Pour effacer leur aspect blanchâtre provoqué par le dépôt du calcaire contenu dans l’eau de l’eau, un nettoyage est opéré 2 fois par mois.
A l’occasion de leurs 150 ans une exposition sera organisée sur les Champs Elysées ainsi qu’une manifestation avec en particulier la Society of Wallace Fontains. Les dates ne sont pas précisées.