Maintenir les Jeux Olympiques, une folie?

La donne, qu’on le veuille ou non, a changé pour la tenue en 2024 des Jeux Olympiques à Paris.

L’épidémie que nous connaissons, qui n’est pas terminée et pour laquelle les spécialistes nous disent qu’elle risque de repartir, de nouvelles pandémies étant probables à l’avenir, devrait  dès à présent conduire à l’annulation d’une telle manifestation à Paris. Personne ou très peu cependant sont ceux qui osent aborder ce sujet surtout en période électorale et pourtant… Seul Guy Drut ancien champion sportif et ancien ministre des sports a osé affirmer que « … Les Jeux olympiques et paralympiques ne font pas exception à ce nouveau contexte. Ils doivent eux aussi se réinventer. » Sèchement du côté des organisateurs des JO 2024, il a été rétorqué que … » l’on avait pas attendu le Covid 19 pour se réinventer ... », c’est-à-dire pour mettre sur pied des jeux plus sobres, plus économes, plus écologiques et plus responsables… Mais sûrement pas gratuits !

Les autorités japonaises ne se sont pas trompées et ont reporté à un an plus tard les JO 2020 de Tokyo. Auront-ils d’ailleurs bien lieu en 2021 ? Nul ne le sait.

La concentration de participants venant de tous les pays n’est en effet pas compatible avec une pandémie et on imagine mal des stades bondés, des épreuves qui réunissent les sportifs, les coachs et autres accompagnateurs ainsi que des foules de spectateurs. Une pure folie.

Et comment rentabiliser ou tout le moins amortir une part des investissements engagés si tout doit être annulé peu avant le début des jeux ou même si seulement une partie des participants et touristes sont empêchés suite à la survenue d’une épidémie dans leurs pays!

Engager des lourds aménagements c’est donc prendre un risque, malgré la réversibilité des installations pour des usages sociaux a été annoncée. En ces temps où l’économie a lourdement souffert,  il faut en avoir conscience, les investissements liés aux JO ne sont plus une priorité, quand bien même en les présentant comme un forme de grands travaux pour relancer la machine et un apport d’activité pour les entreprises et les commerçants liés au tourisme  y compris les plateformes de locations saisonnières.

D’ailleurs les caisses sont vides et davantage encore depuis que l’épidémie a fait et continue à faire ses ravages. Doit-on encore aggraver les déficits, y compris à Paris, alors que nous allons tous peiner pour retrouver une situation soutenable économiquement et financièrement ? Comment supporter le coût énorme d’un tel événement ? Les Parisiens devront-ils mettre davantage la main au portefeuille, supporter des travaux interminables, un afflux de visiteurs, le bruit et la malpropreté liés..?  Vraiment maintenir les JO est à l’évidence un risque et une folie.

Nous comprenons qu’il soit difficile pour les politiques appuyés par certains intérêts, notamment celui des entreprises qui veulent profiter de la manne olympique, de se déjuger, d’arrêter et de remettre en cause le travail qui a déjà été engagé. Il n’y a pourtant aucune honte de revenir sur une décision, surtout lorsque la donne a complètement changé. Souvenons-nous enfin que les avis étaient très partagés sur la décision de postuler à ces jeux et que Paris à l’évidence a été retenue parce que les villes candidates peu nombreuses se sont désistées. Il est un peu trop facile d’affirmer ici et là aujourd’hui que tous les Parisiens, les Franciliens et les Français attendent cet événement avec impatience… ce qui est inexact.

 

Nous postons ci-dessous le commentaire qu’a bien voulu nous adresser un adhérent de Marais-Louvre sur cette question de la tenue à Paris des Jeux Olympiques : 

« La donne a en effet bien changé et cela ne date pas du Covid19. On a bien vu depuis des années que plusieurs grandes villes avaient renoncé à être candidates devant une charge devenue exorbitante. Paris et Los Angeles restaient seules en lice. La maire Anne Hidalgo était d’ailleurs au début réticente pour des raisons économiques, avant de changer d’avis en 2015, au mépris de l’opinion d’une grande part de la population de la région parisienne qui craint les conséquences habituelles liées à l’organisation des jeux : travaux, bruit, afflux de visiteurs et ce qui va avec (délinquance, drogue, prostitution …).

La forte récession économique due à l’épidémie va accroître en valeur relative le poids de l’organisation de ces jeux.  Après qu’on nous ait fait valoir que 95% des équipements existaient déjà et en avoir fait un argument pour organiser les jeux, l’actuelle ministre des sports a évoqué le 6 juin de « probables dépassements » des coûts, avec l’insupportable langue de bois habituelle qui consiste à affirmer que « tout est sous contrôle ». Une fois passée l’exaltation de la glorification des jeux (la machine à formater les esprits tourne à plein régime), on aura un lourd bilan financier à assumer. Or en dépit des discours officiels, les Jeux sont surtout devenus un spectacle de performances surhumaines trop souvent obtenues par dopage. Une course sans fin s’est installée entre les techniques de tricherie et celles de dépistage. Le moteur de cette course est le principe du sport-spectacle associé à une surenchère des performances. L’apothéose sur le podium d’une infime minorité des sportifs participant aux jeux est bien loin des bienfaits du sport pratiqué par tous avec mesure. Il y a un décalage entre l’inflation des coûts du sport-spectacle et la proportion grandissante des obèses dans la population (17% en France fin 2019). Les moyens financiers ainsi mobilisés (alors que la récession menace) seraient sans doute plus utiles à une véritable éducation sportive de masse. On peut aussi craindre que, comme cela s’st produit pour d’autres Jeux, la reconversion des équipements se fasse mal.

Enfin une pandémie comme celle que nous venons de subir (ou plus simplement sa suite), deviendrait totalement incontrôlable lors de Jeux. Imagine-t-on un confinement en même temps qu’un pareil afflux de population ? Maintenir les Jeux de 2024 à Paris nous semble bien une folie. La solution la plus raisonnable, et que nous souhaitons, est bien leur abandon pour tout un faisceau de raisons.  Parmi elles : le souhait de la population, le poids financier et les inconvénients des embarras d’un Paris déjà surpeuplé. Il faudrait aussi repenser les jeux. Si on veut absolument les maintenir, une solution, déjà été proposée : au lieu d’une course de prestige comme on en a vu entre grandes capitales pour les accueillir, ce serait de les organiser toujours au même endroit (par exemple en Grèce, berceau des Jeux), avec un soutien financier de l’ensemble de tous les pays. On éviterait ainsi, entre autres, des collections d’équipements à usage unique puis délaissés.

C. Mercier »

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