Chaque premier dimanche du mois, le centre de Paris vit l’opération « Paris Respire ».
Il ne s’agit en fait que de restreindre la circulation des véhicules toute la journée, dans un périmètre qui s’agrandit régulièrement. Aujourd’hui, cette mesure concerne l’ensemble des quatre arrondissements du centre. Rappelons cependant que le Code général des collectivités territoriales dispose que la liberté de circulation est la règle, et que le maire ne dispose pas d’un pouvoir entièrement discrétionnaire en la matière. Les limitations à la circulation doivent ainsi avoir pour objet la protection de l’ordre public, c’est-à-dire la sécurité et la salubrité publiques. La municipalité, qui n’a donc pas le pouvoir d’empêcher toute circulation, joue là encore à tester les limites du droit, mais est bien obligée de laisser libre la circulation sur les grands axes du centre, notamment les grands boulevards, le boulevard. de Sébastopol, la rue de Rivoli, la rue Beaubourg la rue du Renard, ou encore les quais rive droite.
Elle doit également laisser les riverains circuler dans ce qui devient une zone sous contrôle sévère. Pour cela, une quantité impressionnante de policiers municipaux est requise le dimanche pour veiller à la bonne application de cette mesure. Il faut désormais circuler, non seulement avec son permis de conduire, mais avec un justificatif de domicile, à présenter tous les quelque centaines de mètres aux croisements.
Mais là où le problème se corse est lorsque le riverain souhaite, non seulement rentrer chez lui, mais en sortir et se diriger vers les extérieurs de Paris.
En effet, si l’on est bien “riverain” pour se diriger par exemple de la rive gauche vers la mairie du 3ème, la présentation à ce qu’il faut bien appeler une police municipale d’une facture EDF à l’adresse de son domicile ne pose pas normalement de problème.
Mais si l’on habite pour le même exemple dans l’autre sens, toujours vers la mairie du IIIème et que l’on doive se rendre en voiture vers le Panthéon, il faut passer, pour traverser la Seine, la barrière d’un pont de la rive droite vers la rive gauche. Est-on alors encore riverain ? La logique le voudrait, puisque le 3ème, comme le 4ème sud sont également des zones dans laquelle « Paris respire”.
Le 5 mai dernier, le moment où cet exemple a été vécu, les agents municipaux rencontrés au pont Marie, le seul ouvert, ne savaient pas si habitant le 3ème l’on pouvait être considéré “riverain”, car le périmètre de “riverainitude” n’est pas clairement défini. Peut-on passer et poursuivre son chemin, ou doit-on rentrer chez soi et être empêché de sortir de Paris, sauf à suivre les quais rive droite jusqu’aux confins du 12ème arrondissement, et passer rive gauche par le 13ème pour que “Paris respire” encore un peu ?
Une application stricte de la règle municipale rajoute ainsi environ 7 à 8 km inutiles à un trajet normalement de moins de 3 km, ce qui n’est pas très cohérent en matière de lutte contre la pollution.
Si cette mesure doit perdurer, il serait important qu’un périmètre clair soit défini pour clarifier jusqu’où les habitants du centre sont considérés “riverains”, et jusqu’où leur liberté de circulation peut être contrainte. La logique voudrait que ce soit tous ceux concernés par la fermeture des accès aux quatre premiers arrondissements de Paris, et que l’on puisse donc rentrer, mais également sortir du centre les jours de fermeture. En outre, se promener, comme nous sommes obligés désormais de le faire, avec une facture EDF pour justifier de son domicile est assez vexatoire, la ville n’étant plus un espace de circulation.
Sans discuter de la limite du sérieux de telles mesures, il serait donc souhaitable que les habitants du centre puissent au moins disposer d’un badge à apposer sur le pare-brise (en plus de celui de Crit’Air, il reste encore un peu de place pour voir la circulation).
PS : Si Paris Respire dans le Marais, la ville respire également aux Champs-Élysées tous les premiers dimanches du mois. Mais à ce moment la station de métro George V est fermée au public, précisément du fait de la piétonisation. Il n’est donc même plus possible de prendre les transports en commun pour se rendre sur les Champs ces jours-là, et il faut descendre soit à Franklin D. Roosevelt, soit à Charles-de-Gaulle Étoile. Embêtant si l’on souhaite se rendre au milieu des Champs. Ne reste-t-il alors qu’à prendre une patinette électrique ?