Faut-il enrayer le développement du coliving à Paris et en région?

Depuis longtemps déjà la colocation répond aux besoins de locataires intéressés non seulement pour des raisons financières, vivre à plusieurs dans un même appartement est moins onéreux qu’une location classique pour soi seul, mais aussi pour développer du lien social. Nos élus et gouvernants qui ne sont pas parvenus à enrayer le manque de logements tant en France qu’à Paris ont depuis longtemps encouragé ce type de location.

Selon Guy Hoquet qui dispose d’un réseau d’agences immobilières, le coliving, appelé parfois le versant résidentiel du coworking, « est un concept moderne. Il s’adresse aux jeunes actifs, freelances et expatriés. Ce modèle propose des espaces partagés et privés. Les résidents bénéficient de services inclus : ménage, internet, espaces communs aménagés. La colocation, plus traditionnelle, consiste à partager un appartement ou une maison avec d’autres personnes. Chacun dispose d’une chambre privée et partage les pièces communes : cuisine, salle de bain, salon. » C’est une synthèse  entre résidences services et colocations.  En revanche  » la  colocation est souvent plus économique. Les loyers sont partagés entre les colocataires. Ce modèle offre une plus grande liberté. Chacun peut choisir ses colocataires et organiser les tâches selon ses préférences. La colocation est idéale pour les étudiants et les jeunes travailleurs avec un budget limité. L’ambiance est souvent plus détendue et informelle.« 

De plus en plus le coliving, bien qu’à la mode notamment dans Paris et sa région, est critiqué car s’ « il permet de se loger , tout en partageant des pièces communes avec d’autres personnes, le prix de ces loyers pose… question : il rendrait difficile l’accès à de grands logements, notamment pour les familles nombreuses ?  »  Et certains veulent encadrer cette pratique ? Toujours cette spécificité française de vouloir tout réglementer… L’ancien adjoint au logement de la Maire de Paris, aujourd’hui sénateur et président du groupe communiste au conseil de Paris, candidat à la succession d’Anne Hidalgo, est vent debout contre le coliving. En effet des immeubles entiers sont loués de la sorte par des investisseurs particuliers ou des institutionnels et des groupes immobiliers (par exemple les sociétés La Casa, Colonies, Urban Campus, ou Sharies, Axis ou HPC et Bouygues Immobilier, Vinci Immobilier, Action Logement ou la Caisse des Dépôts et Consignations …). Il y a alors un hic pour nos élus, les règles d’encadrement des loyers dont s’enorgueillit Paris ne seraient pas respectées. N’oublions pas au passage tous les appartements qui ne peuvent pas être loués car leur DPE (Diagnostic de performance énergétique) ne rentre pas dans la critères édictés.

Toute cette mousse faite autour du coliving masque les carences de la politique du logement menée à Paris. Le logement social a été favorisé mais aussi durant des années les locations saisonnières… ce qui n’a pas été le cas pour le logement intermédiaire. Par ailleurs Paris a été parmi les premières villes à mettre en place l’encadrement des loyers et le DPE est venu s’y greffer accentuant la problématique du manque de logements.

En réalité c’est la loi du marché qui s’applique qu’on le veuille ou non, mais l’élu parisien cité supra s’insurge du fait que  « Plus un logement est petit, plus il est cher au m². Plus un logement est grand, plus un investisseur aura tendance à le diviser pour avoir une rentabilité maximale« , ce qui exclut une nouvelle fois les familles. Une situation qui n’est hélas pas récente! L’élu veut donc déposer une proposition de loi au Sénat afin de soumettre ce type de location à l’encadrement des loyers. Il veut que les propriétaires privés, investisseurs ou institutionnels friands de ce type de locations et surfant sur la vague du coliving soient pénalisés pour ces pratiques, soit 14 000 lits recensés en France et 7 500 en Ile de  France (*), sans compter les projets en cours. Pour l’élu cela ne peut durer. Pourtant, outre la loi Alur de 2014 et un dispositif qui a favorisé les résidences services, qui a créé les conditions de cette situation de pénurie de logements en sur réglementant l’immobilier ?  Il semblerait toujours selon l’élu en pointe sur ce dossier qu’aucun texte spécifique n’encadre ces résidences assimilées pourtant en droit à des  » résidences services privées » (étudiantes, de tourisme, seniors et maisons de retraite)…  » Les résidences coliving se distinguent toutefois des résidences services sur trois plans : leurs publics cibles ; l’accent mis sur les espaces communs et une offre servicielle « communautaire »« .

Les loueurs en coliving insistent  » sur la capacité de ce modèle à répondre aux nouvelles pratiques et attentes d’une partie des « nouvelles générations » (millenials, génération Z) : nomadisme, flexibilité, connectivité, volonté de socialisation, esprit festif…recours au télétravail… Cela commence par une simplification des démarches et des contraintes généralement associées à la location… avec des loyers incluant tous les contrats et abonnements de base (assurance habitation, eau, électricité, énergie, Internet, etc.); durée des séjours flexible, avec des tarifs généralement proposés à la journée, à la semaine » (ou au mois voire plus rare à la journée)… « dans une atmosphère de partage« .

A l’inverse certains dénoncent par le biais du coliving une façon « de permettre une intensification toujours plus importante de l’usage des surfaces résidentielles, tout en réduisant le coût des travaux initiaux et des équipements à acquérir par l’investisseur. » et une «  financiarisation croissante des parcs locatifs privés métropolitains ». C’est aussi une forme de détournement des PLU (Plans Locaux d’Urbanisme) où un partie des logements à réaliser doit être du logement social. Pour éviter les dérives, mieux vaut donc contrôler. Une autre spécificité française  !

Certes ces derniers points ne sont pas neutres, alors que ce mode de location répond a des besoins (« un compromis intéressant pour pour les étudiants et les actifs en début de carrière professionnelle tout en dégageant des taux de rentabilité à même d’attirer des investisseurs »), faut-il pour autant en limiter la progression, voire peut-être à terme l’interdire sous prétexte qu’il ne répond pas aux critères d’une offre inclusive, par trop dogmatique ? Dommage pour ceux qui sont réduits à dormir dans leur voiture car ils ne trouvent pas de logement…

 

(*) Selon la société d’études Xerfi 2024 « Le marché du coliving. Les stratégies innovantes pour optimiser la croissance et diversifier la demande »,

Sources : l’Institut Paris Région du 23 janvier 2025, Le Parisien du 17 04 2025 « Nouveau fléau immobilier » ou  » solution à la crise du logement »? A Paris le coliving fait débat, France 3 régions 13 avril 2025

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