Nous reproduisons ci-dessous un article publié le 29 août 2017 par « Les yeux d’argus » sur l’histoire d’une île toute proche de l’île Saint-Louis, aujourd’hui disparue, l’île Louviers.
» Sur les cartes de Paris publiées avant le XIXe, apparait une mystérieuse île, l’île de Louviers. Pourtant lorsqu’on longe les quais de la Seine aujourd’hui, on ne rencontre que trois îles : l’île de la Cité, l’île Saint-Louis et l’île aux Cygnes. Qu’est donc devenue l’île de Louviers ? A-t-elle, telle l’Atlantide, sombré au fond de la Seine ? D’une taille comparable à l’île Saint-Louis (environ 400m de long), cette île était située en amont de cette dernière, entre le quai Henri IV et le boulevard Morland. Elle portait à l’origine le nom d’île aux Javiaux car elle était formée d’un amas de sable et de limon (« le javeau ») charriés par la Seine et la Bièvre.
Au début du XVe siècle, elle prit le nom de Nicolas de Louviers, le prévôt des marchands de Paris, qui en avait la jouissance. Elle était alors couverte de pâturages. Au XVIe et XVIIe siècle, elle fut plusieurs fois le théâtre de spectacles organisés pour le plaisir des rois. Ainsi, en 1549, la ville y fit construire un pont, un fort et un petit port afin d’organiser pour le roi Henri II et à la reine Catherine de Médicis, un spectacle de combat naval et de prise d’une forteresse. Le plan de Paris de Truschet et Hoyau, daté de 1562, figure d’ailleurs pour la première fois une construction sur l’île Louviers qui est sans doute un des bâtiments construits à l’occasion de cette réjouissance royale.
En 1613, sous Louis XII, pour la fête de la Saint-Louis, un petit château rempli de fusées de feux d’artifice fut dressé sur l’île Louviers et il mis en feu. Le roi, âgé de douze ans, et sa mère, la reine régente, ont pu admirer le spectacle pyrotechnique depuis leur tribune placée sur le quai des Célestins.
Au XVIIIe siècle, l’île perd son statut de parc d’attraction royal. Elle est acquise par la ville de Paris en 1700 et louée aux marchands de bois parisien qui s’en servent comme lieu de stockage. Elle se couvre alors de constructions et est desservie par deux ponts : la passerelle de l’Estacade ou le pont de Grammont (voir première illustration, plan de 1760). Quelques gravures et tableaux du XVIIIe et début du XIXe siècle ont immortalisé ces deux ponts (NDLR: un de ces tableaux [*] a été retenu pour illustrer l’article du blog).
Avec le règne du roi Louis-Philippe commencent les premiers grands travaux de modernisation de Paris, qui seront poursuivis sous le Second Empire, par le Baron Haussmann. Ces travaux vont faire disparaître la pittoresque île Louviers. Dans les années 1840, sur ordre du roi Louis-Philippe, le bras de la Seine qui séparait l’île de la rive droite de Paris est comblé. L’ile Louviers perd son statut d’ile et est réuni au quai Morland. L’ancien bras de Seine comblé devient le boulevard Morland. Le pont de Grammont devenu inutile est détruit. La passerelle de l’Estacade survivra, en étant plusieurs fois reconstruite, jusqu’en 1931. Quant à l’île Louviers elle-même, on peut encore en deviner les contours sur les vues aériennes et les plans de Paris. »
Pour de plus amples informations sur les îles parisiennes disparues décrites sur le site Paris.fr, cliquez ici
[*] Alexandre-Jean Noël, L’île Louviers et la pointe de l’île Saint-Louis, vers 1780, Paris, musée Carnavalet (le pont Grammont apparaît dans la moitié gauche du tableau)